Forte d’innovation contemporaine et de tradition historique, l’industrie de la mode a une fois de plus redoublé de créativité. La chronique de la Fashion Week du prêt-à-porter féminin printemps-été 2025 a bien des choses à raconter.
Cette saison, le mercato de la mode est en ébullition. Le départ soudain d’Hedi Slimane chez Celine et l’arrivée imminente de son successeur, Michael Rider, murmurent un changement radical à la direction artistique de la maison, suivi d’un potentiel retour de son É historique. Mais avant d’habiller de spéculations les griffes et leurs tournants créatifs, la mode a brillé d’une Fashion Week de septembre étincelante. Certainement le mois de la mode le plus attendu, en septembre, l’industrie a effectué sa rentrée en bonne et due forme. La première semaine new-yorkaise a mêlé couture et culture, avec notamment, un défilé Alaïa entre les volumes courbes du musée Guggenheim, et un show Ralph Lauren hommage à son raffinement américain natal, conjugué à l'élégance exquise des Hamptons. S’en est suivie quelques jours d’une mode audacieuse et émergente à Londres, où des maisons historiques telles que Burberry ne cessent de se renouveler, tandis que d’autres jeunes créateurs, de KNWLS à la lauréate du Prix LVMH, Nensi Dojaka, imposent leur regard novateur. Enfin, ladite mode se laisse envoûter par l'ingéniosité italienne, forte d’un passage indispensable à Milan, aussi surprenant que convaincant. Aux côtés de Raf Simons, Miuccia Prada a dévoilé une énième thèse philosophique du vêtement, à mi-chemin entre une symphonie des couleurs authentique et une approche humaine théorique. Autre poésie transalpine, le défilé Bottega Veneta vu par Matthieu Blazy, un retour en enfance physiquement appuyé par ses assises infantiles et ses vêtements statement, de l’insouciance à l’âge adulte, en passant par l’adolescence.
Puis, les retrouvailles mondiales entre la mode et ses enthousiastes se sont précisées lors d’un dernier volet parisien de neuf jours, en front row de sa capitale. Parmi les plus de 70 défilés de la Fashion Week de Paris, les marques ont hautement contribué au rayonnement de l’Hexagone, paré de nouveautés sensationnelles en matière de mode. Chez Dior, Maria Grazia Chiuri, dans une fièvre post-Jeux Olympiques plus ou moins assumée, déployait une lignée d’amazones aux drapés empruntés à la Grèce Antique, mêlés à des finitions sportives résolument contemporaines. Un dialogue entre tradition et modernité que la maison aime accentuer, avec la performance live d’une archère, sous les sonorités électro-pop de l’artiste la plus bankable de l’industrie, Charli XCX. Chez Louis Vuitton, les silhouettes de Nicolas Ghesquières s'élançaient sur un patchwork de malles, podium caractéristique de l’artisanat plus que jamais désirable du matelier français. Chez Chloé, Chemena Kamali signait une deuxième collection aussi prometteuse que ses premiers volumes romantiques lors de son arrivée à la direction artistique en 2023. La femme Chloé est la plus moderne des bohèmes parisiennes, au parfum de mystère magnétique. Parmi ces podiums sensationnels, certains, très attendus, on créé l'évènement. Voici sans plus tarder les 5 défilés printemps-été 2025 qu’il ne fallait pas manquer à la Fashion Week de Paris.
Le lendemain du coup d’envoi de la semaine de la mode parisienne, au soir, entre les volumes modernistes du siège Saint Laurent, Anthony Vaccarello déployait des silhouettes hors du temps. Androgynes, les looks jouaient d’un équilibre parfait entre féminin et masculin, digne de la révolution stylistique de son couturier fondateur, architecte du genre au-delà des frontières. En hommage inédit au génie de la griffe, les premiers mannequins provoquaient une illusion d’optique, celle de l’homme derrière la silhouette du siècle, Monsieur Yves Saint Laurent. Un à un, la première dizaine de looks récite en rythme les prouesses de tailoring de la marque, épaules larges de charisme, cravates symétriques aux structures graphiques des blazer, pantalons évasés au paroxysme de la féminité, lunettes du maître épaisses de savoir… Le costume est plus célébré que jamais, voué à redéfinir une sensualité féminine résolument puissante. Anthony Vaccarello s’est ensuite tourné vers les muses de Saint Laurent et leur allure colorée, de Loulou de la Falaise à Paloma Picasso. Grands jupons scintillants de lurex couleur du soleil, superpositions de dentelle haute en couleurs pour une symphonie vibrante de pigments, vestes ajustées en brocart fleuri… Toutes les influences phares de l'œuvre Yves Saint Laurent s'offraient de nouvelles élancées judicieusement réinventées.
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Symphonie de pastels déployée sur une superposition vestimentaire, mêlant impers et office wear, les premières silhouettes de Julien Dossena chez Rabanne inspirent la jovialité d’une simple banalité. Des aplats d’argenté, des motifs florissants et des ajours surprenants se frayent progressivement une audace mode, entre les tricots et les chemises de bureau.
Coup d’éclat de ce podium aux allures minimalistes : un scintillement métallique, serein d’appliquer son reflet en clin d'œil au génie de son couturier originel. Métallurgiste de la mode, Paco Rabanne façonnait ses silhouettes de matériaux contemporains pour un effet hors du commun. Perpétuant cet héritage étincelant, Dossena a créé un effet de surprise en or, du même ressort que “la robe la plus chère du monde”, de 1 000 carreaux d'or et 300 carats de diamants, portée par Françoise Hardy en 1968, muse éternelle. En écho à cette silhouette événement, le défilé Rabanne printemps-été 2025 a introduit un trio inédit de sacs 1969, incontournables de la griffe, imaginés en or 18 carats avec l’atelier Arthus Bertrand, en verre marbré avec Venini et en céramique avec Astier de Villatte. Ou quand l’exception se met au service de l’émotion.
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Poésie rétro-baroque trouvée dans les volants, dans les dentelles, dans les nœuds, dans les sequins, ou encore, dans les broderies qui s’apparentent à des tapisseries. Le tout élevé par une palette de couleurs flamboyante, issue des paysages de Rome à Florence, le premier défilé Valentino d’Alessandro Michele avait tout d’une Renaissance. Si en 2015, le designer arrivait chez Gucci avec un premier jeu de silhouettes pensé en cinq jours seulement, Michele entretient plus que jamais son éternelle esthétique si singulière, à mi-chemin entre le maximalisme italien et la romance exquise. Décor de fin de soirée burlesque, éclats de miroir sur le sol, les silhouettes Valentino sont dramatiques de folies. Généreux de superpositions et de motifs, les looks saluent l’histoire du costume italien, entre folklore des années 1960 et twists contemporains. C’est finalement entre les murs fictifs d’un manoir luxueux abandonné que Alessandro Michele a ravivé l’héritage de Valentino Garavani.
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Retrouvailles de taille. Après plus de trois ans de travaux, la maison au double C a retrouvé la structure industrielle du Grand Palais, réchauffée par ses fenêtres monumentales, sources de lumière rénovatrice. Pour célébrer en finesse l’émotion de cette réunion, la scénographie du défilé Chanel, autrefois supermarché, aéroport et station spatiale du temps de Karl Lagerfeld, a opté pour un clin d'œil poétique. Dans la splendeur épurée du Grand Palais, la maison a installé une cage à oiseaux spectaculaire, la même nichée par Vanessa Paradis en parfait oiseau Coco dans un spot publicitaire légendaire de 1990, tout droit sorti de l’esprit Jean-Paul Goude. La chanteuse et ambassadrice Chanel siégeait parmi les invités en front row du défilé. Plus encore, elle a cédé sa place sur la balancelle à la promesse d’Hollywood, Riley Keough, artiste prolifique à la voix angélique. Sur un parterre rose poudré, les silhouettes Chanel offraient la douceur d’une mode de velours, où tweed aux découpes féminines, voiles pastels et plumes immaculées donnaient le don de cette envolée lyrique.
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Clôturer en beauté. Dernier rendez-vous de cette semaine de la mode parisienne, ou plutôt, marnovallienne : le défilé Coperni printemps-été 2025. Comme un enchantement, la sphère mode a quitté sa capitale pour Marne-la-Vallée, lieu très convoité pour sa passerelle vers le pays des merveilles. Habitué des archétypes phares de son univers onirique, Disneyland Paris a troqué ses parades signatures pour un défilé presque irréel. A la tête de cette collaboration inédite, Arnaud Vaillant et Sébastien Meyer, fondateurs de Coperni qui aspirent au conte de fée. Orientés vers l’innovation, si leur précédent défilé introduisait un sac à 99% d’air et des escarpins astronomiques, le duo de créatifs a cette fois coupé le souffle du public, des étoiles dans les yeux. Princesses des temps modernes parées de pièces en velours pastel et papillons artificiels, suivies de vilaines contemporaines, du sweat à capuche à cornes à la robe bustier à piques… Dos au château de la Belle aux bois dormants, le défilé spectaculaire Coperni a exaucé plus d’un rêve d’enfant.
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Écrit par Téa Antonietti